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Cet homme-là s'aimait beaucoup.!!! (Henri Gougaud )
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Le sou de rossignol Henri Gougaud
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Origine du maïs. - Henri Gougaud
Au matin du quatrième jour apparait au seuil de sa hutte un étranger au beau regard. Il s’assied en face de lui. Il est coiffé de feuilles vertes et vêtu d’un plumage d’or. Wunzi se tait mais son coeur tonne. Il ne sait s’il a devant lui un vivant de chair véritable ou si la faim trompe son oeil. Il lui tend une main tremblante. Son geste reste à mi-chemin car l’étranger parle. Il lui dit :
- Enfant, mon nom est Mondawmin. En moi est un savoir utile que tu peux m’arracher du corps. Pour cela tu dois me combattre. Si tu parviens à me tuer tu ne seras pas né pour rien parmi les hommes de la terre.
- Puisqu’il le faut, répond Wunzi.
Il se lève. Il se sent fiévreux. Il a mal de la tête aux pieds. Mondawmin lui aussi se dresse. Wunzi s’agrippe à son manteau, il cogne du front, il s’enrage. Combien de temps s’acharne-t-il ? Quand vient la fin de la journée, il ne voit plus que brume rouge. Mondawmin le prend aux poignets. Il dit :
- Je reviendrai demain.
Wunzi tombe le front dans l’herbe. Quand il relève enfin la tête, la lune est seule à le veiller.
A l’aube l’étranger revient. Wunzi se sent plus démuni, plus misérable que la veille mais plus furieux, plus dur de coeur. Il combat comme un enragé. Vient le soir à l’horizon rouge. Mondawmin le prend aux cheveux. Il lui dit, la bouche à l’oreille :
- Demain est notre dernier jour. Si tu parviens à me tuer, enterre-moi. Ne m’oublie pas. Soigne ma tombe un an durant, je n’aime pas la mauvaise herbe. Le temps venu je renaîtrai.
Il disparait dans le ciel noir.
Dernière nuit, nouveau matin. Wunzi s’avance sur la plaine. Mondawmin vient dans le vent vif. Son plumage est éblouissant. Sa coiffure de feuilles vertes frémit, environnée d’oiseaux. Il fait halte, il ouvre les bras. L’enfant aussi. Ils se contemplent et tout soudain, d’un même élan, s’étreignent comme père et fils depuis trop longtemps séparés. Wunzi à cet embrassement met toute la vie de son âme, toute la force de sa chair. Bientôt le front de Mondawmin se renverse, ses yeux se ferment, et ses jambes perdent le sol. Il meurt ainsi, sans une plainte. Alors Wunzi le couche là, sur l’herbe que le vent fléchit. Il le déshabille et l’enterre. Enfin il peut rentrer chez lui.
Passent le printemps et l’été. L’enfant tous les jours est venu. Il a prié, lavé la terre sur la tombe de Mondawmin. A la première aube d’automne une plante nouvelle nait. Ses longues feuilles sont semblables à celles qui coiffaient le front de l’homme au costume de plumes. Elles habillent un épi luisant. Wunzi s’agenouille et se penche.
- Bienvenue, Mondawmin, dit-il. Merci de revenir au monde.
C’est ainsi, disent les anciens, que le premier plant de maïs fut donné au peuple des hommes . "
Le chant des fées -Sylvie Folmer
» Au crépuscule, il allait s’allonger dans une clairière au coeur de la forêt.
Il aimait à dormir sans toit.
Une étoile luisait au firmament, chaque nuit plus belle, chaque fois plus proche. Tous les soirs, les rêves transparents de l’homme tressaient vers le ciel une fine échelle de lumière. Il y montait toujours, les yeux fermés, le coeur ouvert, le pas infiniment confiant.
Un matin, alors qu’il allait se laver au ruisseau bordant la clairière, il avait vu sur l’eau scintiller un sourire de femme. Entre les feuilles de l’arbre qui surplombait les flots, la fée de l’étoile le regardait. Elle était belle, cette promise tout juste descendue des songes de son amant.
Ils s’étaient caressés en riant. Le temps avait passé. Elle avait en gémissant mis au monde trois enfants. Ils avaient vieilli, s’adorant patiemment.
Un matin, le fée avait su qu’elle devait s’en aller par-delà la tristesse et la joie. Mais, avant, elle voulait remercier cette terre qui lui avait ouvert les bras, ce pays où elle avait été rêvée, espérée, aimée enfin et qui, maintenant et pour longtemps, porterait ses enfants.
Au coeur de la forêt, elle avait fait glisser à ses pieds, dans une valse de poussière, sa robe rouge et ses bracelets d’argent. Elle avait tendu à son époux un sac rempli de graines de toutes les couleurs et s’était allongée, dans un frisson, nue sur la terre noire. Au creux de ce nombril du monde, elle s’était mise à chanter, d’une voix claire et forte, qui bientôt avait envahi toute la clairière. Et tandis qu’elle chantait, son beau corps pâle, poreux, s’était lentement enfoncé dans le sol. Quand il avait été entièrement recouvert, l’homme avait, comme il était dit, semé toutes les graines données.
Et puis à genoux dans la boue, il avait pleuré longtemps, pluie tendre sur la vie avalée de sa bien-aimée.
Au matin, le premier rayon du soleil avait effacé dans le ciel toute trace de tristesse. Sous la coulée d’or de sa chaleur, les graines avaient germé en une senteur chaude et sucrée.
De cette floraison sur le corps hospitalier d’une fée, le premier jardin du monde était né. «